16 décembre 2008

Fight-Club Vellocet: Tribute to David Fincher (& Hommage aux jeunesses Grecques)!


« Chaos, « confusion » et histoires de « savon »… David Fincher facture en 1999 une mise en scène « hardcore», on ne peut plus d’actualité 9 ans après sa sortie, plongeant l’audimat dans l’univers morbide des caves décorées à la sauce extrême violence, façon Kubrick et ses Droogies réanimés 20 ans après dans le dédalle américain. Bienvenus dans le Fight Club clandestin de Tyler Durden, lequel s'engouffre illico dans le monde des middle-kicks en solde, et du capitalisme le plus «No Life» du genre. On va pas faire dans le Télérama pompeux et arrogant, mais quand même petite autopsie d’un chef d’œuvre incontournable, se révélant ni plus moins comme la réincarnation cinématographique inspirée de quelques unes des préoccupations philosophiques de Nietzsche, Zizek ou Engels…

Fight Club, de l’or en barre sur la dégénérescence urbaine et la suffisance du libéralisme, un arrière goût de « morgue ou gloire » pour les disciples du Projet Kaos, un film à voir et à revoir, comme un trésor des familles!

Prologue:
« A la fin du premier mois la télé ne me manquait plus!.. »

John, trentenaire torturé et solitaire, dirige sans reproches sa carrière d’expert au sein d‘une compagnie d‘assurance internationale. Blasé de son quotidien monotone, et ne se satisfaisant plus des cadavres publicitaires gisant dans la boite aux lettres, il décide de tromper son insomnie en intégrant des clubs d’entre-aide psychologique où il côtoie des individus atteints d’handicaps irrémédiables. Finalement sans succès…

Très vite il fait la rencontre de Tyler Durden, un vendeur de savon énigmatique à la philosophie bagarreuse et anarchiste. Ensemble, ils décident de créer un, puis plusieurs, clubs de combat clandestins dont les règles se diffusent partout dans le pays.
Appuyés par une bande d’adhérents conquis, les deux hommes organisent une large campagne de destruction des symboles de la finance…

Au moyen d’une fiction subtile, David Fincher réactualise à sa manière l’opinion largement relayée, par nombres de penseurs ou militants politiques, selon laquelle une vraie démocratie ne pourrait être régulée par l’Etat et les lois, mais que par l’intermédiaire des mœurs antagonistes et les désirs opposés des citoyens.

Dans le prologue du scénario, John, aidé du déterminisme à toute épreuve de son compagnon de rue, dresse un « portrait » de société et refuse d’en partager le principe moral contemporain selon lequel le plus grand danger réside dans les différentes formes d’intolérance et de violence…
David Fincher développe l’idée qu’une haute dose de rejet et de confrontation est nécessaire pour élaborer une critique pertinente de l’ordre des choses, notamment du point de vue économique. Une position toute retrouvée dans l’œuvre de Slavoj Zizek, philosophe contemporain Slovène et fan hors pair du travail de D. Fincher. Slavoj Zizek attaquant tout au long de son parcours la position académique moderne qui impose à l’homme de nuancer et de relativiser ses propres positions, tout en simulant de fausses qualités d’ouverture d’esprit. Ceci décourageant toute tentative de réaction humaine sur l’organisation du système.

Ainsi progresse John, dans un rejet croissant des principes de l’éthique occidentale. Principes qui, toujours selon Slavoj Zizek, ont évolués en occident comme un mécanisme politique perfide, appelé démocratie, visant à étouffer toute tentative de réaction identitaire et idéologique.

Fincher politise John en tant que personnage digne de la philosophie d’Engels voulant que « seules l’inquiétude et l’insatisfaction font réfléchir l’homme sur lui-même ». Enfin, dans une interview consacré à Rock n’ Folk quelques temps après la sortie du film, le réalisateur présentait son héros en tant que réincarnation du surhomme Nietzschéin, « démolissant ce qui a été construit, se libérant en affrontant, s’affirmant en repoussant ses limites, rejetant ce qui n’est pas voulu, conquis comme tel ».

Dans un programme de la chaîne Arte diffusé le 24 Avril 2006, S.Zizek est amené à présenter son œuvre en répondant au paradigme la liant à « l’esprit » du film Fight Club. Zizek localise le problème de la dynamique économique actuelle comme le point de départ à la psychologie de John et Tyler. Une culture affirmant quotidiennement, en dépit des innombrables signaux d’alertes, que quelque chose d’aussi imprévisible, appauvrissant et dangereux que l’économie, doit être érigée au rang de science incontestable en Occident…à mettre entre toutes les mains, à célébrer sur l’autel de toutes les valeurs, l’Economie doit tout imprégner, balayer les idéologies, la culture, la politique, et par elle seule l’homme n’a le choix de survivre.

Fincher réhabilite dans les scènes de propagande interne au Fight Club, un principe classique selon lequel là où les idéologies et les oppositions vivent, le capitalisme (et son support technique qu’est la démocratie ) ne peuvent se développer. Fight Club renvoie les spectateurs à l’idée que, derrière son image de système tout-puissant imposant la mélodie du bohneur, l’ultra-libéralisme est en réalité bien plus précaire qu’il n’y parait, pouvant être anéanti par le simple fait d’une coupure d’électricité générale, d’un crack boursier ou d’un choc pétrolier, ou encore par l’action des membres d’un club de combat clandestin comme c’est le cas dans cette fiction.

Ici John doit faire face à son double Tyler.. Le réalisateur, dans la lignée des Nietzsche & cie défend qu’à l’intérieur de chaque homme sommeil une contre-identité d’essence nihiliste, autoritaire, destructrice et anti-éthique. Corrompre une carrière pourtant brillante, défier les hiérarchies, détruire ce qui a été acquis (un appartement de grand standing équipé du mobilier le plus design), ramener la femme (par l’intermédiaire de Marla la petite écorchure) au rang d’objet sexuel, et s’affranchir du poids de l’appartenance au monde libéral, tel que le fait John afin de mieux répandre son idéal anarchiste…Slavoj Zizek n’hésite pas à interpréter ce schéma comme un maquillage cinématographique du fascisme Italien révolutionnaire, datant de l‘avant guerre: une sorte de « Proto- Fascisme ».

Le chef d’œuvre de David Fincher déshabille et viol notre système, débarrassé du superflu, dépassant les représentations standards du régime officiel, pour en dégager ce qu‘elles renferment de plus « mécanique » et humain. 10 ans depuis ont passés et, fait réel, dans la continuité du film les clubs de combat clandestins se sont multipliés. La violence de John et Tyler Durden peut être conçue comme une violence créatrice, libératrice (et même réparatrice), ouvrant de nouvelles « fenêtres», et soulevant de nouvelles questions, notre époque apparemment la plus tolérante de l’humanité voyant son histoire de la violence perdurer…